Les automates

 

 

Historique rapide

Automates et horloges au Siècle des Lumières

 

 

 

    Réaliser des automates ou systèmes artificiels autonomes animés a toujours été un vieux rêve de l'humanité, particulièrement en forme d'humains (androïdes) ou d'animaux (zooïdes). Par ailleurs, le besoin de dispositifs destinés à mesurer le temps a conduit naturellement à réaliser de tels systèmes autonomes.

 

    Généralisant la définition ancienne on définit aujourd'hui un automate comme "un système qui se meut de soi". Cette définition, due à René Descartes est celle d'aujourd'hui et englobe tout système autonome animé, vivant ou non, quelle que soit sa complexité. La science qui aujourd'hui étudie les automates est la Systémique (ou théorie des systèmes et de l'autonomie) qui a remplacé ce qu'on appelait la Cybernétique (ou théorie des processus de direction asservis).

 

    Mentionnons tout de suite que dans la conception dualiste chrétienne de Descartes, tout ce qui était animé hors l'homme était de même nature : animaux mêmes évolués tout comme les  horloges et étaient ramenables à de simples mécanismes, seul l'homme ayant une âme. Cette conception continuera à dominer jusqu'au XIXème siècle.

 

 

 

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    L'histoire des automates, qui est une des composantes essentielles de celle de l'informatique, remonte à l'Antiquité et entretient des relations étroites avec celle de l'horlogerie pour deux grandes raisons :

    - Une horloge doit fonctionner de manière autonome ;

    - Les techniques utilisées en horlogerie sont aussi celles qui servent à réaliser des automates.

 

    Jusqu'à la fin du XVIIème siècle, tous les systèmes de mesure du temps furent basés sur des écoulements (eau, sable, poids ou ressort avec foliot ralentisseur) ou la consommation d'une substance (lampe à huile, bougies).

 

    Les automates à fonction ludique, artistique ou religieuse (en général statues animées) pouvaient également être mus durant une courte période par des jets d'air chauffé, de vapeur d'eau ou de mercure. On connaît le système qui permettait d'ouvrir les portes d'un temple ou d'animer brièvement des statues lorsqu'on faisait du feu sur l'autel, "miracle" bien décrit par Héron d'Alexandrie.

 

    Les plus anciennes clepsydres (ou horloges à eau) connues, égyptiennes, sont datées d'environ 2.000 ans av. J.C. Les plus fameux automates de l'antiquité sont ceux de l'école d'Alexandrie (Euclide, Archimède, Ktésibios, Philon de Byzance, Héron d'Alexandrie) du II siècle av. J.C. jusqu'au 1er siècle.

 

    L'horloge mécanique date du XIIIème siècle et au cours du XIVème siècle il y eut d'innombrables réalisations et des progrès très importants :

    - Système de programmation de la sonnerie des heures (chaperon),

    - Carillons programmés à commande par tambour sculpté

    - Nombreuses horloges astronomiques souvent avec scènes animées, jacquemarts (Rouen, Prague, Exeter, Chartres, Strasbourg, Salzbourg, Vienne, Venise, etc.). Toutes ces horloges avec programmes fixes, engrenages à taille droite, poids et foliot ralentisseur. Mentionnons la célèbre horloge astronomique réalisée en 1364 par Giovanni Dondi à Padoue.

 

    On ignore qui, au XIIIème siècle, fut l'inventeur du chaperon de sonnerie, ingénieux dispositif qui programme le nombre de coups frappés chaque heure par un carillon d'horloge.
Une invention décisive : le tambour programmable à picots mobiles permettant de changer facilement l'air joué par un carillon (Barthélémy de Koeke en 1467 à Alost). Il est intéressant de remarquer qu'à la même époque, Gutenberg inventait le caractère mobile d'imprimerie.

 

    Au cours des XVIème et XVIIème siècle, la technique horlogère connut de grands développements d'abord en France, en Italie et en Allemagne. Au moment des guerres de religion, les horlogers protestants français, fuyant les persécutions, se réfugièrent à Genève et à Londres où ils fondèrent une puissante industrie horlogère. Les horlogers construisaient deux grands types d'automates qui étaient toujours des réalisations de prestige : d'une part des pièces d'orfèvrerie animées, objets de curiosité destinés à de riches seigneurs, d'autre part de grands automates soit dans des jardins, soit pour des jacquemarts ou scènes animées associées à des horloges publiques de villes puissantes.

 

    Et en 1650, une révolution décisive : l'horloge à pendule de Christian Huyghens, physicien hollandais. Dès ce moment, l'horloge est devenue un instrument de précision faisant consciemment appel à une loi physique. Et remarquons que c'est dès ce moment que les horloges se sont appelées "pendules" du nom de l'organe précis qu'elles contenaient comme les postes portatifs. En 1675, Huyghens inventa aussi le balancier à ressort spiral permettant la réalisation d'horloges portatives précises.

 

    Il faut remarquer que depuis Huyghens toutes les horloges comprennent les mêmes organes :

    - un phénomène physique oscillant (pendule, quartz, oscillateur moléculaire) ;

    - un dispositif compensant l'amortissement et captant l'information périodique (échappement) ;

    - des organes de calcul (mécaniques ou électroniques) convertissant la période du système physique oscillant en unités courantes (des microsecondes aux secondes, minutes, heures) ;

    - un système d'affichage du résultat du calcul pour l'usager (aiguilles, cristaux liquides) ;

    - une source d'énergie (poids, ressort, piles, capteur solaire).

 

    Depuis le milieu du XVIIème siècle, l'industrie horlogère anglaise dominait l'Europe et les découvertes de Huyghens lui donnèrent un essor nouveau. Les tentatives pour développer une technique horlogère en France furent neutralisées par les persécutions contre les protestants (dragonnades, révocation de l'Édit de Nantes) qui entraînèrent des vagues successives d'émigration des élites vers Londres et la Suisse. Et jusqu'en 1750, la domination technique anglaise fut totale.

 

 

 

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    Mais au XVIIIème siècle, le mouvement des idées en France entraîna des progrès décisifs dans trois domaines en interaction :

    - les instruments de mesure du temps ;

    - les automates ludiques conçus aussi comme des objets scientifiques de démonstration ;

    - les machines automatiques à usage industriel.

 

    La mécanique horlogère était au XVIIIème siècle la technique de pointe qui passionnait toutes les élites. En outre il y avait dans le cas de l'horlogerie des enjeux stratégiques importants : on ne pouvait connaître la position d'un navire en longitude qu'à partir de l'heure embarquée dans une horloge de bord. Et il fallut bien en France soutenir les travaux de Pierre Le Roy et de Ferdinand Berthoud, pour disposer d'instruments aussi précis que ceux que réalisaient à Londres John Harrison et Thomas Earnshaw.


    De ce moment-là, et du contexte scientifique et culturel des Lumières, date une domination de l'horlogerie française qui durera jusqu'en 1850, la relève étant alors prise par l'horlogerie suisse qui tirera les fruits de son approche industrielle.


    On sait que Abraham-Louis Breguet (1747-1823) est souvent considéré comme le plus grand horloger de l'histoire, tant par la qualité technique que par la sobre élégance de ses réalisations. Il peut aussi être considéré comme un des fondateurs du design moderne, expression plastique de la fonction d'un objet.


    Les grands horlogers du XVIIIème siècle furent aussi souvent des constructeurs d'automates visant à imiter la vie. Et il faut remarquer que les limites de la mécanique furent atteintes à cette époque. Mentionnons des réalisations célèbres :
    - les automates de Jacques de Vaucanson (1738) : le joueur de flûte, et surtout le canard qui ingérait des aliments et en faisait une bouillie nauséabonde qu'il rejetait par l'endroit habituel. En outre il battait des ailes, etc. Et selon les conceptions dualistes cartésiennes, on pensait avoir réalisé la vie animale.
    - les automates de Pierre et Henri-Louis Jaquet-Droz toujours exposés à Neuchâtel. L'écrivain, le dessinateur et la joueuse de clavecin (1773). Le système de génération des lettres d'un texte par l'automate écrivain semble être le plus ancien exemple d'appel de sous-programme avec adresse de retour dans le programme appelant, technique bien connue des programmeurs d'aujourd'hui.

    - les automates industriels les plus perfectionnés, qui passionnèrent ingénieurs et savants furent les métiers à tisser automatiques.


    Des progrès continus depuis le premier métier à tisser de Basile Bouchon (1725). En 1728, Louis Falcon créé le premier métier à tisser programmable par cartons perforés. Jacques de Vaucanson réalise un métier à tisser programmé en 1745. En 1801 est inventé le célèbre métier à tisser automatique et programmable de Joseph-Marie Jacquard qui jouera un rôle essentiel dans la genèse de l'informatique.

 

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